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Le portrait est sombre, mais la panique n'est pas la solution

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MONTRÉAL – On ne devrait plus être surpris, et pourtant. Au lendemain de l'élimination du CF Montréal en Championnat canadien, il est difficile de ne pas s'ébahir devant la vitesse à laquelle la saison de l'équipe a pris le fossé.

Il y a quelques mois à peine, les compteurs semblaient avoir été remis à zéro. L'entraîneur qu'on avait accusé de tous les maux avait été escorté à la sortie de la ville. Les joueurs qu'il s'était aliénés avaient retrouvé le sourire. Son successeur, un homme affable et un habile communicateur, s'est tout de suite retrouvé du bon côté de l'opinion publique. Et, détail non négligeable, le club avait remanié son effectif et procédé à des ajouts importants sur le terrain. L'optimisme régnait.    

Mais les compteurs ne sont jamais vraiment à zéro avec cette organisation, qui est continuellement tirée vers le bas par un boulet invisible.  

Dans les dernières semaines, de nouvelles vagues sont venues s'abattre sur la coque d'un navire qui voguait jusque-là sur des eaux relativement paisibles. Le mécontentement de l'un des joueurs phares de l'équipe a coulé dans les médias, puis le directeur sportif a décidé de descendre dans le canot de secours. Les remous provoqués par cette chaîne d'événements ont ravivé les discussions sur la structure dysfonctionnelle du club.   

Clairement, les gardiens de l'harmonie du vestiaire n'ont pas été capables d'empêcher les distractions d'infiltrer le sanctuaire.

Depuis que les rumeurs sur les intentions de Mathieu Choinière ont commencé à circuler, l'équipe a perdu cinq fois et a fait un match nul, tout ça en accordant une moyenne de trois buts par match. L'idée n'est pas de lui en faire porter l'entièreté du blâme, mais dans la tourmente, les performances du jeune milieu de terrain québécois ont piqué du nez de façon évidente.

Oui, le CF Montréal doit manœuvrer malgré l'absence de plusieurs blessés. Mais l'excuse ici n'est pas valable. S'il y a une chose que la défaite contre Forge FC a servi à démontrer, c'est que le talent n'a rien à voir avec les déboires actuels des Montréalais. Le plus doué des surdoués n'arriverait pas à faire la différence présentement dans cet assemblage d'individualités complètement déconnectées l'une de l'autre.  

L'envie, l'engagement, la solidarité? Depuis des semaines, ce ne sont que des mots répétés d'une tribune à une autre par des joueurs et des entraîneurs sans réponse. Tout ce qui change, c'est le ton sur lequel on nous les déballe.

Au début du mois, ils étaient accompagnés de la conviction que la confusion était temporaire, que les solutions étaient tout près. Aujourd'hui, ils témoignent plutôt d'un état de choc devant la redondance des échecs.       

Les allusions à un congédiement de Laurent Courtois comme bretelle potentielle vers la sortie de cette crise sont absurdes. Il y a quelques mois à peine, l'embauche de l'entraîneur français était considérée comme un coup de circuit. Pencher vers l'autre extrême aujourd'hui dénoterait d'un flagrant manque de sérieux.

Cependant, dans sa façon de penser la communication avec ses joueurs, Courtois est peut-être déjà arrivé à la croisée des chemins. En public, le jeune pilote s'est toujours montré protecteur, conciliant et patient envers ses gars. Les rares reproches qu'il leur adresse sont communiqués avec doigté et bienveillance. Un peu trop, commence-t-on à lui reprocher.

Dans leurs commentaires publics, ses protégés le lui ont jusqu'ici bien rendu. Sur le terrain, c'est une autre histoire. Nul ne sait comment Courtois s'y prend pour passer son message en privé, mais le temps est peut-être venu pour lui de serrer la vis.

Il le cache de moins en moins bien devant les caméras : le couvercle de la marmite est sur le point de sauter. Pour lui, il pourrait être libérateur de laisser sortir un peu de vapeur. C'est peut-être aussi la seule façon d'en faire sortir certains de leur torpeur.

Courtois savait à quoi s'attendre en arrivant à Montréal. On l'avait prévenu des dérapages auxquels était propice le territoire. Malgré tout, on lui pardonnerait d'avoir été pris de court par la précocité de la catastrophe.

Ceci dit, aussi sombre puisse paraître le portrait actuel et aussi hallucinante puisse être la propension de ce club à l'auto-sabotage, on n'est encore qu'au mois de mai.

En MLS, ce n'est pas encore trop tard pour se sortir du fossé.