Carlos Alcaraz, l'empressé champion
Aussi loin qu'il se souvienne, Carlos Alcaraz a toujours voulu être No 1 mondial. Prodige aussi pressé que combattant acharné, l'Espagnol l'est devenu à 19 ans seulement, faisant de lui le plus précoce de l'histoire, grâce à son premier sacre majeur dimanche à l'US Open.
Sur un court, le jeune homme va très, très, très vite. Ce qui lui permet souvent d'écoeurer ses adversaires, à force de renvoyer toutes les balles, les plus éloignées, les plus fortes, les plus vicieuses, les plus désespérées, pour in fine remporter un point qui semblait inéluctablement perdu.
Cette aptitude se double d'une abnégation sans borne, qui transpire l'humilité et rappelle forcément celle de Rafael Nadal, qualité qui a fait une des caractéristiques et surtout une des clés du succès de ce glorieux aîné, avec un record de 22 titres du Grand Chelem à son actif.
Si on ajoute leur parcours météorique en commun - les deux ont gagné un premier Masters 1000 à 18 ans et un premier Majeur à 19 ans - l'étiquette encombrante de « prochain Nadal » a eu vite fait d'être collée sur le dos d'Alcaraz.
« Cela dure depuis des années sur les réseaux sociaux. Mais j'essaie de ne pas me laisser distraire: je pense à moi, à mes progrès. Je suis de Murcie, lui de Majorque. Il est gaucher, pas moi. Quand j'étais petit, j'étais tout sauf un guerrier, j'étais petit, frêle, pas vraiment puissant », rappelait-il en juin au quotidien italien Corriere della Serra.
Supersonique
C'est à quatre ans que « Carlitos » a commencé à taper ses premières balles, sur les courts ou seul contre le mur du club de tennis dirigé par son père, à El Palmar, près de Murcie, où il vit toujours auprès de ses parents et ses trois frères.
« A 5 ou 6 ans, Carlos avait déjà des qualités naturelles, une très bonne coordination et surtout une capacité à apprendre très vite. Il pouvait copier ce qu'il voyait sur le court. C'est à ce moment-là qu'on a décidé de développer son potentiel », a raconté son père à Trans World Sport.
Dimanche, en remportant son premier titre Majeur à Flushing Meadows, aux dépens du Norvégien Casper Ruud, il a fait d'une pierre deux coups, établissant même un record de précocité pour ce qui est d'atteindre le sommet de la hiérarchie, à exactement 19 ans, 4 mois et 6 jours. Le tout, moins de cinq mois seulement après avoir été le plus jeune joueur de l'histoire à intégrer le top 10. Supersonique.
Coquetterie du destin, c'est à l'US Open, il y a 19 ans presque jour pour jour, que son entraîneur Juan Carlos Ferrero devint N.1, en battant en demi-finales Andre Agassi avant de s'incliner ensuite contre Andy Roddick. Trois mois plus tôt, l'Espagnol s'était imposé à Roland-Garros et son futur protégé, lui, venait de naître.
Le destin les a rapprochés, puisque Ferrero l'a pris sous son aile à 15 ans, dans son académie de Villena, à une grosse heure de chez Alcaraz. « Ça a changé ma vie. J'ai évolué, je suis devenu plus dur sur le court », assure le jeune surdoué.
« Un taureau »
« Je suis prêt à jouer en cinq sets contre les meilleurs, des matchs très longs. Ça ne me fait pas peur. Mieux: c'est un avantage », osa-t-il encore avant Roland-Garros.
Devenu roc, Alcaraz l'a prouvé en sortant vainqueur de plusieurs marathons à l'US Open. Là même où un an plus tôt, pour sa toute première participation, une blessure à une cuisse avait contraint l'Espagnol à bouille d'adolescent à l'abandon en quarts, après un parcours ébouriffant.
Néanmoins lancée, la fusée a passé la vitesse de la lumière cette année, avec quatre titres glanés au printemps, dont ses deux premiers Masters 1000 à Miami puis à Madrid. Dans la capitale espagnole, il a marqué les esprits en dégommant Nadal et Novak Djokovic, alors No 1 mondial, du jamais vu dans un même tournoi sur terre battue.
Pas question alors de se voir arrivé: « Ce n'est pas parce que j'ai gagné ce que j'ai gagné très vite que ça me monte à la tête. Je sais très bien qu'il faut que je continue à travailler pour accomplir mon rêve: être No 1 mondial ».
Quand il a triomphé à Madrid, c'est à ses racines qu'il a pensé en premier. « Vive El Palmar et vive Murcie », écrivit-il sur la caméra présentée aux joueurs. « Je suis très famille. J'adore être chez moi auprès des miens et entre amis. Je ne perdrai jamais cet ADN », expliqua-t-il ensuite.
Les pieds bien sur terre, pour mieux s'élever dans la stratosphère.