La banalisation du marathon
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Lorsque j'ai commencé à courir il y a près d'une trentaine d'années, la distance du marathon était vue comme l'objectif ultime à atteindre. Le saint graal des coureurs!
C'est la raison pour laquelle j'ai fait mes classes et y suis allé graduellement. Après m'être entraîné pour mon premier 5k, je m'étais ensuite concentré sur le 10k, une distance pour laquelle j'avais accumulé plusieurs dossards avant de me tourner vers le demi-marathon. Cette distance me paraissait tellement longue et difficile à compléter que j'avais suivi un long plan d'entraînement d'une vingtaine de semaines pour m'y accoutumer. Je ne prenais pas les choses à la légère!
À ce moment là, la course de 21k me semblait être l'objectif parfait pour moi. Ma destination finale!Jamais au grand jamais l'intention de courir un marathon ne m'avais traversé l'esprit.
Pourtant, un an après mon premier demi-marathon je me retrouvais sur la ligne de départ du Marathon d'Ottawa. J'étais à la fois nerveux et confiant, ne sachant pas trop à quoi m'attendre, mais sachant fort bien que j'avais respecté à la lettre un rigoureux entraînement pour cette distance mythique.
Ce ne fut pas une course facile, mais je l'ai terminée. Je pouvais désormais dire que j'étais un marathonien, un titre qui me glorifiait d'une certaine aura. D'autres marathons prestigieux suivirent, New York, Paris et Rome, mais l'envie de m'inscrire à une course plus longue ne me vint jamais à l'esprit. Après tout, courir un marathon m'avait forcé à me dépasser et me découvrir. C'est tout ce que je voulais!
J'ai l'impression que cela a changé au cours de la dernière décennie. Pour de plus en plus d'adeptes de course à pied, le marathon ne représente plus l'aboutissement d'un parcours de joggeur. Il s'agit plutôt d'une étape vers quelque chose d'encore plus grand…et plus long! Une sorte de banalisation du marathon.
Désormais, l'ultramarathon ou ultrafond semble être devenu la norme pour les coureurs qui souhaitent vraiment se dépasser. Pour pénétrer dans ce monde des ultras, il faut au minimum courir 50 kilomètres. Il s'agit toutefois d'une mise en bouche puisqu'il est convenu que la plupart des coureurs qui se définissent comme des ultramarathoniens s'inscrivent à des épreuves de 100 kilomètres! Les courses de 100 miles (160 kilomètres) ne sont pas rares également.
Comme si la distance n'était déjà pas un défi exceptionnel à relever, ces courses se déroulent souvent dans des conditions difficiles et sur des terrains accidentés. Il y a même des épreuves qui dépassent l'entendement.
Par exemple, le Hardrock 100 a lieu à chaque année au Colorado avec un dénivelé de 10 000 mètres sur 160 kilomètres à une altitude moyenne de 3 500 mètres. Cet ultra est considéré comme la course la plus difficile en Amérique du Nord.
La Jungle marathon mesure plus de 250 kilomètres au Brésil et serpente sur des terrains marécageux où fourmillent des serpents, des moustiques et des crocodiles. Les participants ne doivent pas se perdre dans la forêt vierge qui recèle de nombreux dangers.
Pour ceux qui aiment le froid, le Yukon artic ultra est pour eux! 700 kilomètres sur des pistes enneigées dans une solitude quasi-polaire. Les coureurs doivent être autonomes et tirer eux même leur traîneau contenant des ravitaillements.
Le Grand Raid de la Réunion-Diagonale des Fous porte bien son nom puisqu'il faut l'être un peu pour y prendre part. 164 kilomètres de course sur un dénivelé de près de 10 000 mètres sur l'île de la Réunion dans l'océan Indien. Cette course mythique chez les ultramarathoniens n'est pas pour ceux qui souffrent du vertige. Des températures extrêmes attendent les participants qui doivent composer avec des falaises énormes.
Un dernier exemple. Que dire de la Tor des géants en Italie? 24 000 mètres de dénivelés et 336 kilomètres de course! 25 cols de montagne à traverser dans des conditions météorologiques extrêmes. Seulement la moitié des participants terminent l'épreuve. Les plus rapides en trois jours!
Les ultramarathoniens québécois sont bien servis puisqu'un calendrier intéressant existe à l'intérieur même des limites de la Belle Province. L'Ultra-Trail Harricana de Charlevoix, l'Ultra-Trail des Chic-Chocs, le Bromont Ultra et le Gaspesia 100 Ultra Trail sont quelques bons exemples.
On aura beau faire de multiples courbettes pour me convaincre, je n'en démords pas! Le marathon est la plus belle des distances. Celle qui renferme toutes les lettres de noblesse de la course à pied d'endurance. Faire un seul pas de plus après 42,2km ne m'intéresse pas du tout.
Je dis bravo à tous ceux qui ont l'énergie et le courage pour le faire, mais il y a une fin à tout et celle du marathon est parfaite.
Vous avez complété votre premier marathon ou votre troisième ou votre dixième?N'allez surtout pas vous comparer à un ultramarathonien puisque vous pourriez être déçu!
Dites-vous plutôt que ce que vous faites n'a rien de banal. Vous êtes un marathonien après tout!
Bonnes courses!
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