D’entrée de jeu, on peut souligner la belle victoire enregistrée par les Alouettes de Montréal à Ottawa avec un gain de 27 à 16. Nous avions tous hâte de voir à l’action comme partant Matthew Shiltz, car c’était évidemment ce qui retenait l’attention en vue de ce deuxième duel au cours de la même semaine devant le Rouge et Noir.

 

Shiltz a passé son premier test et même si ça demeure contre une équipe qui connaît beaucoup d’ennuis cette saison, il a relevé le défi. J’ai bien aimé aussi la confiance donnée à Shiltz pour cet affrontement.

 

La recette pour les Alouettes depuis le début de la saison afin de connaître du succès, c’est de se tourner davantage vers la course pour compléter avec le jeu aérien.

D’ailleurs, lors des deux précédentes victoires contre Ottawa, l’équipe montréalaise avait effectué 29 courses contre 23 passes et 29 courses contre 24 passes lors du second match. Je m’attendais donc à une recette similaire d’autant plus que les Alouettes devaient évoluer avec leur quart réserviste en l’absence de Vernon Adams fils, blessé.

 

Finalement, Khari Jones a sélectionné 26 courses contre 34 jeux aériens. Ce qui est encore plus intéressant pour moi, ce sont les sélections de jeux en début de rencontre. Si je mets de côté un instant la deuxième demie alors que les Alouettes avaient les commandes du match et la météo a eu son influence aussi, Shiltz a décoché 21 passes lors des deux premiers quarts et il n’y a eu que 11 courses d’effectuées pendant ce temps. Les Alouettes ont fait confiance au bras de Shiltz et il a répondu présent en complétant 13 de ses 21 passes pour 227 verges et une passe de touché.

 

En même temps, il a relevé le défi, car tout indiquait pour Ottawa que le jeu au sol allait être au coeur de la stratégie. Les Alouettes se présentent à Ottawa avec le meilleur jeu au sol et un quart réserviste comme partant, donc il était logique que le Rouge et Noir prenne le pari que la course allait être prédominante.

 

Les Alouettes se sont donc servis de la menace de jeu au sol pour mieux lancer. C’est la mode en ce moment, les stratégies de course avec une option de lancer le ballon. Le quart décide selon la réaction des joueurs défensifs s’il remet le ballon à son demi offensif ou s’il le conserve pour repérer un receveur qui effectue un tracé sur le terrain.

 

Deux concepts de jeu sont déployés par l’attaque sur une telle séquence et le quart réagit selon ce que l’adversaire lui offre. Les secondeurs sont souvent pris dans un conflit et la défense ne peut pas réellement gagner dans une telle situation. S’il reste avec le receveur, il doit y avoir moins de joueurs à la ligne d’engagement, donc il sera plus facile de courir.

 

S’il mord sur la feinte de course, le receveur peut se glisser derrière et se libérer. Shiltz a été excellent dans sa lecture et il a su rejoindre ses receveurs parfois même pour de longs gains.

 

On sait que Shiltz n’est pas aussi mobile que Vernon Adams, mais il est tout de même assez agile pour gagner plusieurs verges avec ses jambes. Il l’a bien montré sur le premier touché du match. Sur cette séquence, il a improvisé et gagné du temps en quittant sa pochette pour finalement décocher une passe sur une distance de 55 verges. Il a enchaîné avec un jeu d’attiré du quart afin de courir pour une récolte de 14 verges. Il a lui-même complété par la course pour inscrire le majeur.

 

Shiltz a été victime d’une interception dans un match où j’espérais qu’il soit en mesure de protéger le ballon, donc à un revirement, je peux dire mission accomplie. C’était crucial de limiter les interceptions, car les Alouettes affrontaient une équipe qui connait des difficultés sur le plan offensif, donc il ne fallait pas leur ouvrir la porte trop souvent.

 

Sur l’interception, il faut reconnaître que ce n’était pas une bonne lecture comme il y avait deux joueurs sur son receveur, mais peut-être qu’il a voulu recréer la magie sur le touché de Jake Wieneke où à ce moment son receveur a su battre une double couverture pour attraper le ballon. Au moins comme j’ai lancé durant la description du match, son interception représentait un long dégagement en quelque sorte pour les Alouettes comme il a refoulé l’adversaire profondément dans son territoire.

 

Si je devais relever absolument un point à surveiller pour Shiltz lors des prochains matchs, j’ai noté que cinq passes ont été rabattues par les joueurs du Rouge et Noir à la ligne de mêlée. Sur de tels jeux, on donne aussi crédit aux joueurs défensifs, mais parfois, c’est simplement de changer un peu l’angle pour décocher ses passes. Ce n’est pas alarmant, mais ce sont des jeux importants, car soit tu te retrouves en deuxième essai et 10 verges ou tu dois dégager comme c’est une passe incomplète sur un deuxième jeu.

 

Au final, une très bonne note pour Shiltz qui a fait ce qu’il devait contre la dernière équipe au classement dans l’Est.

 

Une fête pour la défense

 

Si le quart s’est illustré pour les Alouettes, que dire de l’unité défensive. C’était un véritable party défensif avec 10 sacs du quart, cinq revirements, dont trois interceptions. On ne s’est pas cassé la tête pour l’unité défensive des Alouettes en profitant des lacunes de l’adversaire.

 

Ce ne sont pas des blagues, le Rouge et Noir déployait une dixième combinaison différente à son dixième match pour sa ligne à l’attaque. Vous comprendrez que c’est impossible d’avoir de la chimie et de la cohésion dans ce groupe. Caleb Evans n’en était qu’à son quatrième départ comme quart-arrière et le demi offensif n’était partant que pour une deuxième fois.

 

Tous ces joueurs forment ce que j’appelle l’unité de protection, car le quart doit repérer la pression, la ligne à l’attaque doit s’ajuster, tout comme le porteur de ballon pour assurer les blocs. Les Alouettes ont multiplié les combinaisons pour mélanger leurs rivaux et ceux-ci paraissaient par moments comme le veut l’expression mêler comme un jeu de cartes.

 

Parfois, il y avait une pression à cinq joueurs, d’autres fois à six, des secondeurs très rapides s’amenaient pour la pression dans des jeux en croisés. La ligne à l’attaque ne parvenait pas à réagir et n’était pas suffisamment athlétique pour contrer la rapidité des Alouettes. C’est d’ailleurs pourquoi Montréal a eu autant de succès en pression avec 10 sacs, dont sept enregistrés par des joueurs différents.

 

Au final, la ligne à l’attaque a réussi six sacs, les secondeurs trois et un demi défensif a su plaquer le quart derrière sa ligne de mêlée.

 

La défense des Alouettes a ussi su fermer la porte après les revirements de son attaque. Non seulement Ottawa n’a pas inscrit un seul point après les trois revirements enregistrés, mais ils ont même concédé deux points avec le touché de sûreté. Donc chapeau à la défense et une mention spéciale à David Ménard qui a connu un fort match avec deux sacs et le plaqué qui a occasionné le touché de sûreté.

 

Ça faisait du bien de voir l’unité défensive réussir cinq revirements, car avant le match elle en avait 12 à son compteur, mais huit avaient été obtenus lors des quatre premiers matchs. Il n’y en avait donc que quatre lors des quatre derniers affrontements. Les Alouettes doivent continuer sur cette lancée avec leurs cinq revirements qui portent leur total à 17.

 

Des ennuis sur les bottés

 

Du côté des unités spéciales, on ne peut pas dire qu’elles ont été très spéciales, surtout dans la première portion du match, puisque Devonte Dedmon a connu beaucoup trop de succès sur les retours de botté.

 

C’est dommage pour le Rouge et Noir qu’il est subi une blessure et c’était évident qu’avec une blessure à un joueur aussi dominant, l’équipe n’allait plus obtenir d’aussi bons résultats sur les retours. Grâce à des retours de 69 et 47 verges, Dedmon a placé l’attaque avec un court terrain devant elle ce qui a permis d’inscrire des points au tableau.

 

Ce qui fait le succès de Dedmon, c’est qu’après avoir attrapé le ballon, il parvient à trouver les bons corridors pour s’engouffrer c’est sa capacité à briser le premier plaqué ou tout simplement à l’éviter. Il peut alors déceler les brèches et gagner de gros morceaux de terrain. On va lui souhaiter que la blessure ne soit pas trop sérieuse, car c’est bon pour le spectacle dans la LCF un joueur aussi dynamique.

 

Place aux choses sérieuses

 

Les Alouettes ont donc quitté Ottawa avec une troisième victoire de suite ce qui offre une fiche au-dessus de ,500 à l’équipe. Malgré cette situation positive pour les Alouettes, les entraîneurs savent qu’il y a encore place à amélioration, car même s’ils ont gagné, c’était loin d’être parfaits.

 

Contre une équipe de bas de classement comme Ottawa, les erreurs ne vont peut-être pas être trop coûteuses, mais contre de bonnes formations, elles vont te faire payer.

 

Par exemple, en cinq présences dans la zone payante, l’attaque n’a inscrit qu’un seul touché. L’unité offensive des Alouettes n’a inscrit aucun point en deuxième demie. Il est vrai que la météo a compliqué la tâche, Khari Jones a admis qu’il avait opté pour une sélection de jeux un peu plus conservatrice, mais il faut tout de même inscrire des points à un moment.

 

En deuxième essai, on parle d’un taux de réussite qui n’est seulement qu’à 33 %. Les Alouettes menaient la Ligue à ce chapitre avec 52 %. Il y a encore eu deux échappés et si j’ajoute l’interception de Shiltz, trois revirements, c’est trop contre une meilleure équipe.

 

Montréal n’avait que quatre revirements à sa fiche lors des quatre premiers matchs de la saison. Depuis, c’est 13 revirements, donc cette mauvaise tendance doit absolument être brisée si l’équipe veut connaître du succès lors de ces prochaines confrontations qui seront devant des équipes avec des fiches gagnantes.

 

Mon dernier point concerne les pénalités. Au moins cette fois, l’équipe a arrêté sa séquence de matchs avec 100 verges de pénalité à trois en recevant pour 90 verges de pénalité. Toutefois, certaines ont été coûteuses pour les Alouettes.

 

Si on gratte un peu sous la peinture, on réalise qu’elles sont plus significatives que les simples verges allouées à l’adversaire. À un moment durant le match, les Alouettes écopent d’une pénalité sur un dégagement qui aurait refoulé Ottawa à sa ligne de 24. Finalement, une pénalité de 10 verges fait reculer l’équipe et le botté doit être à nouveau effectué. Après le second botté, le Rouge et Noir parvient à remonter jusqu’à la ligne de 14 des Alouettes. La pénalité de 10 verges a finalement coûté 72 verges aux Alouettes.

 

À un autre moment, une pénalité d’hors-jeu sur un troisième essai et quatre verges alors qu’Ottawa effectuait un placement a permis à l’attaque du Rouge et Noir de revenir sur le terrain et sur le jeu suivant, elle a inscrit un touché. La pénalité a donc offert quatre points supplémentaires à l’adversaire au lieu des trois points pour le placement.

 

Contre une équipe avec deux victoires et huit défaites, ça peut passer, mais ce ne sera pas toujours le cas.

 

Les Alouettes devront avoir l’instinct du tueur. L’échappé de Cameron Artis-Payne à la ligne d’une verge a permis au Rouge et Noir d’éventuellement resserrer le pointage à 12-10 au lieu de faire 17-0 en faveur des Alouettes. Ces derniers devront arrêter de laisser l’adversaire revenir dans le match.

 

Les Alouettes peuvent se réjouir avec trois victoires de suite, mais l’équipe entre dans la portion croustillante si vous voulez du calendrier avec des duels contre de bonnes formations. Je parle de match devant les Argonauts, les Roughriders et deux fois les Blue Bombers qui sont un rouleau-compresseur.

 

On va donc en apprendre encore plus sur les Alouettes et Shiltz. L’affrontement contre Toronto est primordial pour la course dans l’Est. Les Argos ont vaincu les Alouettes 30 à 27 cette saison, donc Montréal doit l’emporter par au moins quatre points afin d’avoir l’avantage dans un bris d’égalité au classement.

 

On arrive à l’automne, le temps est plus frais, les feuilles ont changé de couleur, donc on sait que les éliminatoires approchent et les Alouettes doivent jouer du football en ce sens. Ça reprend vendredi prochain à Montréal contre les Argonauts.

 

Propos recueillis par Maxime Tousignant