Je me permets de commencer cette chronique comme se terminait la plus récente de mon collègue Marc Denis : « Vivement la pause ».

Loin de moi l’idée de pleurer sur le sort des joueurs de la Ligue nationale de hockey, qui sont des jeunes hommes extrêmement choyés à tous les points de vue, mais au delà des considérations matérielles, ils demeurent des athlètes à qui on demande beaucoup. Parfois à la limite de ce que le corps peut offrir, même s’il est dans une forme exceptionnelle.

Au moment d’écrire ces lignes, nous sommes à deux heures de vol de Montréal, au retour de Phoenix, en début d’après-midi, vendredi. Le Canadien a disputé 6 rencontres au cours des 10 derniers jours, dont trois à l’étranger. Au cœur de ce segment, il y eut deux envolées de plus de quatre heures, l’adaptation à un décalage de deux heures dans les deux sens et à l’altitude de 5280 pieds de Denver. À peine revenus à Montréal, les joueurs sauteront sur la patinoire du Centre Bell, contre une équipe qui est déjà à Montréal depuis jeudi soir. Puis, ils sauteront à nouveau dans l’Airbus 319 d’Air Canada Jetz pour se rendre à Boston immédiatement après le match, pour y affronter des Bruins qui sont présentement dans une séquence d’une quinzaine de jours à la maison! Juste d’écrire ces quelques lignes, on en est presque essoufflé!

S’il est vrai que toutes les équipes de la LNH font face au même calendrier compressé et que les équipes de l’Ouest doivent aussi composer avec des voyages plus longs, force est d’admettre que l’horaire du Canadien est on ne peut plus bizarre, pour ne pas dire ridicule. À commencer par ces 10 occasions, au cours de la saison, où l’équipe ne revient à domicile que pour un match, avant de reprendre la route! Non mais, quand même! Ne serait-il pas plus facile de combiner deux ou trois rencontres et de prolonger le séjour à domicile suivant? Je vous prie de me croire mes amis, depuis le 22 décembre, nous avons l’impression de ne plus avoir de chez-soi!

Je sais que les responsables du calendrier de la LNH ont un rôle de plus en plus difficile à jouer. Les 30 amphithéâtres du circuit sont extrêmement sollicités pour toutes sortes d’occasions qui n’ont rien à voir avec le hockey et l’ajout de la Coupe du Monde et celui de la semaine de relâche sont venus sérieusement compliqué le processus. Mais ces explications ne changent pas le résultat final.

Lorsque je faisais mention de la forme exceptionnelle des athlètes, précédemment, je faisais allusion autant à la forme physique qu’à la forme mentale. Les deux sont d’importance d’égale, foi de tous ceux à qui j’ai posé la question et qui ont joué dans la Ligue nationale. Or, ce calendrier déséquilibré du Canadien n’a pas seulement d’impact sur le corps, mais il devient éreintant pour la « tête » et j’oserais dire, pour le « cœur ». C’est particulièrement vrai pour ceux qui ont des enfants, la plupart en bas âge et qui doivent composer avec l’aspect émotif de l’éloignement et des absences répétées. La touchante histoire d’Andreï Markov n’est peut-être pas courante, mais elle illustre si bien le facteur humain qu’on a souvent tendance à oublier, dans le cas des athlètes professionnels.

Des solutions complexes

Comment corriger la situation? La solution la plus « facile » est malheureusement la moins attrayante pour les dirigeants du circuit, soit celle de réduire le nombre de matchs au cours d’une saison. Une seule rencontre de moins, à chaque mois, permettrait de niveler les choses tellement mieux, pour les 30 équipes. Mais cela représenterait entre trois et quatre programmes de moins pour chaque formation, en saison régulière et cela s’accompagnerait d’un coût extrêmement élevé, compte tenu du fait que les revenus proviennent surtout du box-office. Étirer la saison de deux ou trois semaines? Elle se termine déjà beaucoup trop tard, vous serez d’accord. Refaire un calendrier pondéré géographiquement et ainsi réduire le nombre de longs déplacements? Les équipes ne veulent plus de ce mécanisme utilisé dans le passé, prétextant l’importance d’offrir à leurs partisans la chance de voir à l’oeuvre au moins une fois les 29 autres formations.

Le Trio: le Canadien en bonne position

On le constate donc, il y a peu de correctifs réalistes à apporter, à court terme. C’est probablement d’ailleurs ce qui a incité l’Association des joueurs à demander cette période de relâche : tant qu’à devoir composer avec un calendrier aussi intense, aussi bien le diluer un tout petit peu avec ces quelques jours de repos. Mais dans le contexte de la tenue d’une Coupe du monde à l’automne ou d’une participation aux Jeux olympiques en hiver (perspective qui devient cependant de moins en moins probable selon les derniers échos), le prix à payer pour les joueurs est tout simplement énorme et cela est vrai aussi, par ricochet, pour les entraîneurs et tous ceux qui gravitent quotidiennement autour d’une équipe de la LNH.

Chose certaine, dans le cas du Canadien et à la lumière de la tenue de l’équipe récemment, les quelques jours d’éloignement qui viennent arrivent à un moment on ne peut plus salutaire. Si Carey Price a grandement besoin de retrouver sa concentration et de refaire le plein (comme bien des gardiens élites présentement), plusieurs autres joueurs doivent aussi recharger les piles, à tous les points de vue, avant d’aborder le dernier droit qui s’annonce.

Par défaut et jusqu’à nouvel ordre, on ne peut conclure qu’une seule chose : vivement la relâche!