Le Temple de la renommée du hockey a rehaussé son image et solidifié ses colonnes déjà très solides avec les intronisations de Chris Chelios, Geraldine Heaney, Scott Niedermayer, Brendan Shanahan et Fred Shero. Cinq grands parmi les grands. Cinq magiciens à leur façon à qui le monde du hockey a réservé une soirée magique.

Une soirée entièrement consacrée aux intronisés et à leurs invités. Une soirée qui contrastait énormément avec celle de l’an dernier alors que la cérémonie s’était déroulée sous le spectre du conflit de travail qui paralysait la LNH. Une cérémonie au cours de laquelle la tension reliée à la guerre opposant la LNH et ses joueurs volait la vedette aux souvenirs nombreux et heureux multipliés par les intronisés au cours de leurs illustres carrières.

Joe Sakic, Mats Sundin, Pavel Bure et Adam Oates méritaient mieux l’an dernier. Heureusement cette année, Chelios, Niedermayer, Shanahan, Heaney et Shero ont eu droit à tous les honneurs et à toute l’attention qu’ils méritaient. Qu’ils méritaient pleinement.

Les trois principaux intronisés, Chelios, Shanahan et Niedermayer ont conjointement disputé 65 saisons dans la LNH. C’est énorme. Mais plus encore, on peut facilement conclure en survolant chacune de leur carrière qu’au moins 60 de ces 65 saisons n’ont pas seulement été bonnes, voire très bonnes, mais qu’elles ont été exceptionnelles.

Les dix conquêtes de la coupe Stanley qu’ils ont célébrées s’ajoutent en prime à ces carrières bien remplies.

Chelios s’excuse

Premier à être intronisé, Chris Chelios a été fidèle au joueur qu’il a été au cours de sa carrière de 26 ans dans la LNH. Direct, un brin cabotin, Chelios a bien sûr remercié tous ceux qui ont aidé cet Américain natif de Chicago à se rendre jusqu’à la coupe Stanley.

Il a ensuite offert ses excuses aux bonzes du Temple de la renommée qui viennent à peine de lui ouvrir les portes. « Je voudrais m’excuser tout de suite pour le tort que je risque de causer à titre de pire pisse-vinaigre de l’histoire », a-t-il lancé à mi-chemin entre la blague et la vérité.

Bien qu’il garde des souvenirs heureux de tout ce qu’il a fait sur la patinoire, Chelios, qui a toujours affiché une animosité à l’endroit des dirigeants de la LNH, a dit regretter amèrement les quatre conflits de travail qui ont paralysé le circuit au cours de sa carrière.

« Des conflits dont personne n’est sorti gagnant. Des conflits qui ont miné certaines amitiés avec des coéquipiers et des adversaires. Des conflits qui étaient politiques bien plus que sportifs », a ajouté Chelios.

Aussi dur et tumultueux dans la vie que sur la glace, Chris Chelios a aussi offert des excuses à son premier directeur général dans la LNH, Serge Savard, qu’il a plusieurs fois placé dans l’embarras pendant ses « belles » années avec le Canadien.

Monstre d’entraînement, la clef de sa longévité qui lui a permis de disputer 1651 matchs de saison régulière, 266 matchs de séries échelonnés sur 24 saisons, deux records de la LNH, et de jouer jusqu’à ce qu’il se rende compte qu’à 48 ans, il était temps d’arrêter.

De fait, ce n’est pas l’âge, mais les statistiques qui l’ont convaincu : « Je n’avais pas de but, pas de passe, pas de point après sept matchs – avec les Thrashers d’Atlanta en 2009-2010 – à ma dernière saison. C’est là que j’ai compris », a reconnu Chelios.

Chelios a salué la relation d’amour/haine qui l’a lié tout au long de ces années à son entraîneur personnel. « Particulièrement de haine », s’est-il permis d’ajouter.

« Chris Chelios est certainement l’un des défenseurs les plus durs contre qui j’ai évolué dans la LNH. Quand il sautait sur la patinoire, tu devais être sur tes gardes. Tu savais que tu serais frappé. Et que parfois, ce ne serait pas légal. Il était dur oui, mais il était bon aussi. Il t’obligeait à être meilleur quand tu étais sur la patinoire contre lui », a témoigné Peter Stastny croisé sur le tapis rouge menant aux portes du Temple de la renommée.

Avec une émotion évidente qui a suivi la présentation des membres de sa famille venus le rejoindre sur la scène, Chris Chelios a démontré à quel point l’honneur que le Temple de la renommée lui réservait en lui ouvrant toutes grandes ses portes le touchait : «J’espère que je serai associé au hockey encore longtemps. Mais si c’est la dernière fois ce soir que je me retrouve sur une scène associée au hockey, j’aurai vécu une fin fantastique.»

Shanahan : d’un simple mur au Temple

Brendan Shanahan, le prototype de l’attaquant de puissance, le seul joueur alliant une touche magique de marqueur (ses 656 buts le confirment) et un penchant pour le jeu rude (plus de 2000 minutes de pénalité) a profité de sa soirée d’intronisation pour dévoiler un côté plus tendre de sa personnalité.

À titre de nouveau membre du Temple de la renommée mais aussi de vice-président de la LNH responsable de la sécurité des joueurs, Shanahan a invité tous les joueurs, les anciens comme ceux qui évoluent présentement, à afficher un plus grand respect les uns envers les autres.

« Il ne faut pas oublier que nous formons une grande confrérie. Comme c’était souvent le cas avec mes grands frères, il y a parfois de la bagarre, des divergences d’opinions, de la rivalité, mais il ne faut jamais oublier que nous sommes tous unis dans ce sport que nous pratiquons et qu’il est essentiel d’avoir à cœur le respect des uns envers les autres », a lancé Shanahan.

Shanahan a aussi tenu à saluer son père qui est décédé alors que le nouveau intronisé n’avait que 21 ans. Il a évoqué un souvenir de jeunesse un brin surprenant. Alors âgé de huit ou neuf ans, Shanahan avait été surpris par son père alors qu’il écrivait son nom sur un mur avec de la craie.

« Un homme qui écrit son nom sur un mur n’a pas de grandes ambitions dans la vie », avait lancé le père du jeune Shanahan.

Bien que cette remarque avait secoué le jeune homme, Shanahan a tenu à la partager avec ses invités et le monde du hockey. Car il tenait à dire à son père que toutes ces années plus tard, il aurait bien aimé être en mesure de lui faire lire son nom sur la plaque accrochée depuis hier au mur du Temple de la renommée.

Niedermayer humble et discret

Bien qu’il ait gagné tout ce qu’il est possible de gagner dans le monde du hockey, que ce soit dans les rangs juniors, dans la LNH ou sur la scène internationale, bien qu’il ait soulevé la coupe Stanley à quatre reprises et qu’il soit considéré comme l’un des défenseurs les plus intelligents et doués de son époque, Scott Niedermayer est entré au Temple de la renommée un peu comme il a joué durant toute sa carrière : discrètement, humblement.

Après une présentation effectuée par son frère Rob, Niedermayer a salué, un à un, ses entraîneurs et ses coéquipiers qui ont marqué sa carrière.

Il a bien sûr salué ses partenaires à la ligne bleue des Devils du New Jersey sans oublier ses entraîneurs Pat Burns, Larry Robinson et son gardien Martin Brodeur qui a mainte fois racheté des erreurs qu’il venait de commettre en effectuant des arrêts dont il a toujours eu le secret.

Niedermayer a également eu de bons mots pour le Québécois François Beauchemin qui était son compagnon de jeu à la ligne bleue des Ducks d’Anaheim avec qui il a soulevé sa dernière coupe Stanley en 2007.

Geraldine Heaney

Le Temple de la renommée a poursuivi sa tradition, ô combien justifiée, d’ouvrir ses portes aux meilleures joueuses de hockey au monde.

Après Angela James et Cammi Granato en 2010, Geraldine Heaney, meilleur défenseur de l’histoire du hockey féminin au Canada, voire au monde, a fait une entrée discrète hier.

Dans l’ombre des grandes vedettes de la LNH et de Fred Shero qui a assuré sa place dans l’histoire à titre de l’un des grands entraîneurs, Geraldine Heaney a déridé la foule à quelques occasions avec un discours d’intronisation surprenant.

Après avoir annoncé qu’elle troquerait avec plaisir ses souliers à talons hauts à l’intérieur desquels elle se sentait beaucoup moins à l’aise que dans ses patins, Heaney a salué les membres de sa famille. Sa fille qui lui ressemble. Son fils « un peu bougon » qui s’est mis à pleurer aussitôt que ses voisins se sont mis à rire à la suite de la remarque de sa maman. Sans oublier son mari qui s’est souvent fait tirer la pipe au travail par ses collègues qui lui reprochaient d’avoir un tir frappé moins puissant que celui de sa femme…

Heaney s’est aussi assurée de remercier ses parents – et de passer du coup un message à tous les autres parents – qui n’ont jamais tenté de la dissuader de pratiquer le sport qu’elle a toujours aimé en prétendant que les filles n’avaient pas leur place au hockey.