MONTRÉAL - François Legault a été choqué de voir des partisans abreuver d'insultes racistes un joueur de hockey noir, samedi à Saint-Jérôme, et il en appelle au sens civique des spectateurs qui seraient témoins de telles scènes.

Le premier ministre a été interrogé mercredi matin en mêlée de presse à l'Assemblée nationale sur le cas de Jonathan-Ismaël Diaby, un joueur de la Ligue nord-américaine de hockey qui a été la cible d'insultes racistes lors d'un match à l'aréna régional Rivière-du-Nord. M. Legault a déclaré qu'il se serait attendu à ce que le match soit interrompu afin que les auteurs des insultes puissent être expulsés de l'aréna.

Le premier ministre a par ailleurs invité les spectateurs à intervenir lorsqu'ils entendent des propos racistes et à déclarer clairement qu'une telle conduite n'était pas acceptable. « J'en appelle aux ligues de hockey, aux autres spectateurs: on a le droit de dire à quelqu'un qui tient des propos comme ça: ça n'a pas de bon sens! », a soutenu le premier ministre. « Voyons donc, on ne peut pas tolérer ça, qu'on insulte un joueur de hockey parce qu'il est noir! »

Lors d'un match opposant les Marquis de Jonquière aux Pétroliers du nord de Saint-Jérôme, samedi soir, des partisans ont lancé des insultes à caractère raciste à l'endroit du défenseur jonquiérois Jonathan-Ismaël Diaby, en plus de lui montrer des images de singe, alors qu'il se trouvait au banc des pénalités.

L'ex-choix des Predators de Nashville, âgé de 24 ans, a aussi constaté qu'on s'en prenait à sa famille venue le voir jouer - il est originaire de la région. Craignant de ne pas être en mesure de garder son calme après avoir écopé d'une deuxième pénalité, il a lui-même demandé à l'arbitre de purger cette pénalité au vestiaire. Il a alors décidé d'aller rejoindre sa famille dans les gradins et de quitter l'aréna.

Le premier ministre Legault se serait attendu alors à ce que les responsables de l'aréna et des spectateurs réagissent rapidement. « Les ligues plus professionnelles sont supposées d'avoir de la sécurité, donc moi je m'attends à ce que le match soit arrêté, qu'on sorte ces personnes-là de l'aréna, a-t-il soutenu mercredi. Maintenant, il y a des petites ligues où ils n'ont pas toute la sécurité, et moi je fais appel aux autres spectateurs, quand on entend des propos racistes. »

Entreprise privée

La ministre déléguée à l'Éducation, Isabelle Charest, une ex-olympienne, a rappelé que ces ligues de hockey et ces arénas sont des entreprises privées, sur lesquelles le gouvernement n'a aucune autorité. Elle a toutefois indiqué qu'à la suite d'une récente bagarre générale dans cette ligue, le gouvernement avait entamé des démarches pour dresser l'« état des lieux » et élaborer éventuellement avec les responsables de la Ligue nord-américaine de hockey un « plan d'action » ou un « protocole » pour gérer ces situations.

Le député libéral Enrico Ciccone, lui-même un ancien joueur de la Ligue nationale de hockey (LNH), a déclaré aux journalistes qu'il souhaitait que la police s'en mêle. Ceux qui font des commentaires haineux - ou ceux qui mettent la main sur le père du hockeyeur - devraient faire face à des accusations criminelles, a estimé le porte-parole de l'opposition officielle en matière de sports.

« Nous publions des guides sur la façon de se comporter dans les arénas, mais ils ne fonctionnent pas », a déploré l'ancien dur à cuire de la LNH, qui se dit déçu que personne ce soir-là - pas même un spectateur - ne soit intervenu. « J'ai été dégoûté de ce que j'ai vu. »

Chantal Bellemare, de la Police de Saint-Jérôme, a confirmé mercredi qu'aucune plainte n'avait été déposée. Elle a précisé que toute personne souhaitant porter plainte à propos de l'incident pouvait appeler la police.

Jean-François Laplante, commissaire de la Ligue nord-américaine de hockey, établie au Québec, a présenté ses excuses à M. Diaby et à sa famille, et dénoncé les gestes des partisans, qui constituent selon lui une infime minorité. « Les propos racistes, sexistes, homophobes sont tout à fait inacceptables et intolérables, que ce soit dans la vie de tous les jours ou dans nos arénas », soutient M. Laplante dans une vidéo publiée sur le site de la ligue, qui compte six équipes. « Bien que cela concerne une infime partie de nos partisans, en prévision des séries éliminatoires qui arrivent à grands pas, je vous invite à être de bons partisans. »

Sur leur compte Twitter, les Canadiens de Montréal « condamnent tout comportement visant un joueur, un entraîneur, un officiel ou un partisan en raison de sa race, de sa religion ou de son orientation sexuelle, et ordonnent l'expulsion immédiate de toute personne qui commet de tels actes dans notre aréna ».

« Le hockey doit être une expérience agréable pour la famille; tous les intervenants - organisations, joueurs, parents, frères, soeurs, entraîneurs, arbitres, bénévoles et préposés à la patinoire - ont un rôle à jouer dans l'atteinte de cet objectif. »