Malheureusement, j’avais dit dans ma dernière chronique qu’il était possible de voir un relâchement de la part des Alouettes lors du dernier match du calendrier régulier et c’est ce qui s’est produit.

On avait hâte de voir comment ils allaient réagir une fois officiellement qualifiés pour les éliminatoires et voilà le résultat. Les Tiger-Cats avaient plus à gagner que les Alouettes et on l’a senti dès le premier jeu. J’avais aussi dit que les unités spéciales serviraient de baromètre, et c’est là que ça s’est joué.

« Une claque dans la face »

Certains joueurs ont eux-mêmes admis qu’il y avait eu une baisse de régime et que l’effort n’avait pas été suffisant, dont Nicolas Boulay à l’émission Blitz. Les gars disaient avant ce match qu’ils étaient imbattables, invincibles, mais parler de la sorte est un jeu dangereux. C’est dommage parce qu’ils devront désormais prendre le chemin difficile pour se rendre à la Coupe Grey. Au moins, ils ont la chance de participer aux éliminatoires et c’est positif car on n’y croyait plus vraiment après avoir présenté une fiche de 1-7 après les huit premiers matchs cette saison.

Les joueurs risquent d’être motivés par cette défaite. Durant chacune des saisons de ma carrière d’athlète comme celles où mon équipe a remporté deux coupes Vanier et deux coupes Grey, je me souviens de défaites qui ont été une belle leçon d’apprentissage. Souvent la défaite est plus importante que bien des séquences victorieuses car tu peux apprendre beaucoup dans l’adversité. Tu apprends notamment que tu n’es pas invincible et que n’importe qui peut te battre. Un revers, c’est important pour te ramener sur terre, te rappeler qu’il faut travailler fort et te remémorer ce qui fait que tu es rendu là.

Cela dit, une semaine de congé aurait été la bienvenue à ce stade de la campagne. Tyrell Sutton, le porteur de ballon no 1, s’est blessé et n’est pas certain de jouer. La ligne à l’attaque est aussi amochée et James Rodgers a reçu un coup à la tête. On n’a pas eu de nouvelle à son sujet, mais ça semble être une commotion cérébrale. La semaine de congé aurait fait du bien à ces gars-là qui, au lieu de pouvoir se reposer, doivent immédiatement retourner au boulot. Stratégiquement, ça aurait aussi permis aux entraîneurs de préparer les plans de match en fonction des adversaires potentiels pour la finale d’Association Est.

Si on regarde la situation d’un œil optimiste, les Alouettes pourront au moins rester dans leur zone. Il n’y a pas de relâchement possible et ils auront constamment le nez dans leur cahier de jeu.

Plus droit à l’erreur

La défense joue du football inspiré. C’est elle qui a permis aux Als d’effectuer une remontée historique. On ne peut toutefois pas être aussi élogieux à tous les égards.

Les points faibles sont les mêmes depuis le début de l’année et il y aura donc  du travail à faire cette semaine à l’entraînement. Les unités spéciales connaissent des difficultés depuis un bon bout de temps. Il y a eu une bonne période quand Rodgers est arrivé comme retourneur, quand on sentait qu’on avait le vent dans les voiles, mais ça n’a jamais été constant cette saison. De l’autre côté du terrain, on va affronter un excellent retourneur en Stefan Logan et il va falloir le contenir.

Kevin Glenn

Le gros point d’interrogation demeure l’attaque. Qui pourrait remplacer Tyrell Sutton? Chris Rainey n’est pas un gars robuste. On pourrait demander l’aide de Brandon Rutley sur l'équipe de pratique, lui qui était présent au camp d’entraînement mais qui n’a pas joué de l’année. C’est peut-être une option envisageable, mais ça change aussi le cahier de jeu. Malheureusement, moins on a d’options comme porteurs de ballon, plus l’attaque va reposer entre les mains de Jonathan Crompton et ce n’est pas ce qu’on veut. On a bien vu contre Hamilton que ce n’est pas toujours facile lorsque c’est le cas. Il n’est pas obligé de chercher les longs jeux, il doit surtout éviter les erreurs, tenter de contrôler le temps de possession et permettre à la défense de respirer un peu. Il sera aussi important de saisir chaque occasion quand elle se présente et marquer dans les terrains courts parce qu’il faut inscrire des points quand on le peut. Chaque possession va être importante pour l'unité offensive.

Quant au quart adverse, je m’attends à voir Kevin Glenn (photo) dans l’action même si Travis Lulay est remis de sa blessure. Lulay n’a presque pas joué de l’année car il s’est blessé en septembre à la même épaule pour laquelle il avait été opéré durant la saison morte. Je crois qu’il est davantage une police d’assurance. Les Lions feraient une grosse gaffe en le plaçant dans la formation parce qu’il n’a pas joué et qu’il n’a pas tout son synchronisme. C’est lui le joueur de concession et le quart-arrière avec un gros salaire, mais dans la présente situation, ce serait trop difficile pour lui de retrouver son rythme rapidement. Mais si jamais il devait obtenir le mandat, il faudra essayer de le frapper tôt et vite pour ne pas le laisser retrouver son rythme et lui faire penser à son épaule. C’est dommage de penser ainsi, mais c’est la nature du sport.

Glenn, lui, a déjà été dans les éliminatoires et c’est un gars d’expérience. C’est lui qui a mené l’équipe aux éliminatoires. D’un côté il manque de constance, il a lancé beaucoup d’interceptions dans des moments inopportuns, mais on l’a aussi vu être explosif à d’autres moments. On ne sait jamais à quoi s’attendre de lui. Cela dit, ce n’est pas un match qui va lui faire peur en bon vétéran qu’il est.

De l’inconnu de part et d’autre

Ça fait longtemps que les deux équipes n’ont pas croisé le fer. Ça remonte en fait au 19 juillet. Je n’ai même pas l’impression que les entraîneurs vont regarder les bandes vidéo de leurs deux affrontements à moins qu’on veuille analyser des confrontations spécifiques entre, par exemple, un certain receveur contre un certain demi défensif. Beaucoup de choses ont changé depuis. Troy Smith était le quart-arrière, chaque équipe était en début de développement et Andrew Harris était le porteur de ballon du côté des Lions. Il y a eu beaucoup de permutations au sein de leur ligne à l’attaque. 

Malgré tout, les deux formations se ressemblent beaucoup. Sans être dramatique, ils ont des ennuis derrière le centre car leurs quarts-arrières ne sont pas dominants et n’offrent pas du jeu convaincant. Les deux ont connu des hauts et des bas.

Elles ont perdu leur porteur de ballon no 1 en Brandon Whitaker, chez les Moineaux, et Harris. Elles comptent sur des receveurs capables de faire de gros jeux comme Duron Carter et S.J Green ou encore Emmanuel Arceneaux et Ernest Jackson. De plus, la défense forme leur identité et la ligne défensive est capable d’appliquer de la pression et de faire des jeux clés. Les secondeurs sont excellents, que ce soit Chip Cox, Kyries Hebert et Bear Woods d’un côté ou Solomon Elimimian et Adam Bighill de l’autre.

La principale différence est que les Lions ont terminé leur saison en queue de poisson. Ils ont perdu cinq de leurs sept derniers matchs, dont les deux plus récents. Ils ne sont pas sur une bonne séquence et ils se cherchent. Qui plus est, ils n’ont pas connu beaucoup de succès à Montréal, comme c’est le cas pour les Alouettes à Vancouver, donc le fait de jouer au Stade Percival-Molson est à mon avis un gros avantage pour les locaux.

En bref, s’ils sont capables de limiter les erreurs en attaque, de jouer encore solidement en défense, de créer des revirements pour donner des terrains courts à l’attaque et de faire match nul sur les unités spéciales, je pense que les Alouettes vont gagner.

*Propos recueillis par Audrey Roy