Toute une façon de débloquer!

Attendus à bras ouverts par les amateurs de hockey et les journalistes, Patrick Roy et l’Avalanche du Colorado ont été accueillis avec une brique et un fanal par le Canadien.

En fait non. La brique et le fanal n’étant d’aucune utilité pour gagner un match de hockey, le Canadien a plutôt eu recours à deux tours du chapeau, l’un réussi par Thomas Vanek et l’autre par les trois membres du 4e trio, pour doubler l’Avalanche et son entraîneur-chef vedette.

Reluquant les deux points à l’enjeu, deux points qui lui ont filé entre les mains, Patrick Roy pourra quitter Montréal avec, en guise de consolation, le souvenir heureux de l’ovation qu’il a reçue lorsque son visage s’est retrouvé en gros plan à l’écran géant pendant l’interprétation des hymnes nationaux.

Pour le reste, sa jeune équipe ne lui a pas donné l’occasion de célébrer grand-chose sur la patinoire.

Bon! Nathan MacKinnon a étalé son grand talent plusieurs fois lors de la rencontre. Il a marqué un but. Il a obtenu six tirs sur Carey Price. Il a volé deux rondelles au Canadien. Il a prouvé que Roy a eu bien raison de pousser sa candidature à titre de premier choix du dernier repêchage. Il a aussi confirmé aux rares qui affichaient peut-être encore des doutes qu’il est le seul candidat en lice pour le titre de recrue de l’année dans la LNH.

Non seulement est-il seul dans la classe de 2013 à reluquer de trophée Calder, mais il rejoindra sans l’ombre d’un doute les plus surdouées des recrues à avoir mis la main sur ce trophée au fil des ans dans la LNH.

« J’ai dirigé de très bons jeunes de 18 ans et 19 ans au cours de ma carrière, des joueurs au talent exceptionnel, a convenu Michel Therrien sans jamais prononcer les noms de Sidney Crosby et Evgeny Malkin, et je peux dire que Nathan MacKinnon fait partie de ce groupe de jeunes exceptionnels », a même tenu à indiquer l’entraîneur-chef du Canadien.

Mais au-delà des beaux élans de ce jeune surdoué, d’un autre surdoué en Matt Duchene, de son capitaine Gabriel Landeskog, du gros défenseur Erik Johnson, l’Avalanche est demeurée dans l’ombre du Canadien.

C’est bien pour dire…

Vanek débloque

Blanchi malgré ses 20 tirs obtenus lors de ses trois premiers matchs dans l’uniforme tricolore, Thomas Vanek a ouvert toutes grandes les valves. Il a marqué son premier dans un filet désert après que David Desharnais eut haché finement la défensive de l’Avalanche en affichant un magnifique contrôle de la rondelle et une patience de moine. Lorsque Desharnais a rejoint Vanek dans l’enclave, il n’a eu qu’à pousser la rondelle et a eu tout le temps au monde pour la regarder glisser et amorcer la célébration de son premier but qui nivelait les chances 1-1 en deuxième période.

Les deux clubs se sont ensuite échangés des avances. Avec un score de 3-3 en troisième, on commençait à envisager la prolongation lorsque Jean-Sébastien Giguère a écopé une vilaine pénalité. Le gardien québécois a agrippé le bâton de Dale Weise, offrant une attaque massive au Tricolore. Une troisième dans le match.

Incapable de marquer lors des deux premières supériorités, le Canadien a fait mentir le proverbe « jamais deux sans trois ». Après avoir raté une chance en or sur un bel échange à trois, Vanek a couronné les efforts de ses compagnons de trio David Desharnais et Max Pacioretty en marquant un but de toute beauté.

Mais on n’avait pas encore tout vu.

Car moins de trois minutes plus tard, encore lors d’une attaque massive, Vanek a habilement fait dévier un tir d’Alexei Emelin derrière Giguère pour compléter son tour du chapeau. L’Autrichien a démontré toute son habileté en faisant dévier la rondelle même si elle filait derrière lui.

Où étaient les casquettes?

Si Vanek s’est fait généreux avec ses trois buts, les fans du Canadien l’ont été beaucoup moins alors que deux casquettes seulement se sont retrouvées sur la patinoire.

Et encore!

Elles sont apparues après la reprise du jeu.

Les partisans du Canadien se sont toutefois repris en fin de rencontre. Pendant qu’une partie de la foule entonnait le traditionnel Olé! Olé! Olé! pour souhaiter à Patrick un au revoir moins poli que tous les mots de bienvenue qui lui avaient été adressés depuis dimanche, l’autre partie s’est mise à scander le nom de Vanek. Et lorsque le héros de la soirée s’est retrouvé sur la patinoire pour compléter son tour d’honneur à titre de première étoile de la rencontre, deux autres casquettes ont terminé leur envol sur la glace.

Quatre casquettes pour un tour du chapeau. Je veux bien croire qu’elles se vendent à prix d’or à la boutique souvenir, mais simonac! Dans le bon vieux temps, les fans inondaient la patinoire de beaux Fedora lorsque le Rocket ou le Gros Bill inscrivaient trois buts dans un même match. Et cela arrivait pas mal plus souvent qu’aujourd’hui…

« Je n’ai pas de problème avec ça, a plaidé Vanek dans le vestiaire du Canadien après le match. Avec le froid qui frappe à l’extérieur, peut-être que les gens ne voulaient pas sortir nue tête. »

« J'ai eu des frissons »

Le mot clef ici est peut-être…

Quatrième trio

Si Vanek a enfilé ses trois premiers buts avec le Canadien, ses compagnons de trios ont ajouté deux passes chacun. Dans le cas de Pacioretty, il s’agissait de ses 16e et 17e seulement de la saison. Mais les deux passes de Desharnais lui ont permis d’atteindre le plateau des 30 passes.

C’est toutefois le quatrième trio qui a causé le plus de surprises. Car si on était en droit de s’attendre à des buts de Vanek à un moment donné, voire à un tour du chapeau, Travis Moen, Brandon Prust et Dale Weise ont tous trois marqué hier.

Weise l’a fait dans un filet désert en toute fin de rencontre. C’est vrai. Mais dans le cas de Moen et Prust, ils ont enfilé de très beaux buts.

Moen a sorti ses mains du dimanche en marquant d’un tir du revers au terme d’un tourniquet à l’embouchure du filet rappelant les gestes popularisés par Denis Savard. « Il ne faudrait pas exagérer », a lancé Moen avec un sourire gêné considérant qu’il n’a inscrit que son deuxième but de la saison hier.

Même chose pour Brandon Prust qui a surpris tout le monde, lui le premier, avec son tir dans la lucarne qui a déjoué Jean-Sébastien Giguère en début de troisième période.

« Marky (Andrei Markov) m’avait offert une passe semblable plus tôt dans le match. Comme je n’ai pas su en profiter, il est venu me voir pour me suggérer de freiner afin de mieux tirer. Quand j’ai vu la rondelle entrer dans le but, je lui ai simplement demandé si j’avais bien suivi ses conseils », blaguait le nouveau centre du tout nouveau et plus qu’intéressant quatrième trio.

Fort de cette victoire surprenante et convaincante aux dépens de l’Avalanche, le Canadien maintient sa deuxième place dans la division atlantique. Parce qu’il n’a que deux points d’avance sur le Lightning de Tampa Bay qui a deux matchs en mains, on ne peut pas dire que le Canadien est solidement installé derrière les Bruins de Boston.

Mais il est clair maintenant que ses chances d’accéder aux séries ne font plus de doute. Ou si peu…

Le match en chiffres

0 – L’attaquant Ryan O’Reilly et le défenseur André Benoit n’ont toujours pas écoulé la moindre minute de pénalité après 67 matchs cette saison. O’Reilly n’a jamais écopé plus de 18 minutes de pénalité en une saison depuis son entrée dans la LNH…

3 – C’était la troisième fois seulement cette saison (34-3-3) que l’Avalanche encaissait un revers en temps réglementaire après qu’il eut marqué le premier but. Le Canadien n’a pas à afficher quelque complexe que ce soit face à Patrick Roy et son équipe puisqu’il affiche un dossier de 30-3-2 lorsqu’il est le premier à s’inscrire au pointage…

3 – Thomas Vanek a réalisé le troisième tour du chapeau de la saison chez le Canadien. Max Pacioretty – contre le Wild du Minnesota et les Canucks de Vancouver – était le seul joueur à avoir marqué trois buts au cours d’un même match…

4 – Ce n’est pas un vrai tour du chapeau, mais les buts de Moen, Prust et Weise ont permis aux trois membres du quatrième trio de marquer au cours d’un même match pour la première fois de la saison… pour la première fois depuis un bon bout de temps…

8 – Travis Moen (+3), Dale Weise (+3) et Brandon Prust (+2) ont permis au quatrième trio de terminer sa soirée de travail avec un différentiel de plus-8. Ce n’est pas rien…

9 – Nathan MacKinon a cadré six des neuf tirs qu’il a décochés en direction du filet de Carey Price. Son coéquipier défenseur Erik Johnson en a fait autant, mais seulement quatre rondelles se sont rendues au gardien du Canadien, les cinq autres ayant été bloquées en défensive…

22 – À titre de comparaison avec les gentilshommes de l’Avalanche O’Reilly et Benoit, David Desharnais est le joueur du Canadien le moins pénalisé au sein du groupe de joueurs qui ont disputé au moins 66 rencontres. Il a passé 22 minutes au cachot.

27 – Il y a une semaine à peine, Francis Bouillon rongeait son frein en attendant l’occasion de retrouver sa place au sein de la brigade défensive du Canadien. Hier, il a effectué 27 présences sur la patinoire, plus que tous les autres défenseurs du Tricolore…