Après avoir métamorphosé le visage de l’Avalanche du Colorado et attiré les regards aux quatre coins de la planète hockey grâce à des résultats impressionnants, Patrick Roy vivra, mardi soir, son premier match au Centre Bell comme entraîneur dans la LNH.

Roy (qui sera dans les studios de l'Antichambre ce soir) ne peut guère nier l’évidence que cette partie sera spéciale à ses yeux et cette soirée tant attendue – notamment des amateurs – a commencé à habiter ses pensées dimanche soir après un autre triomphe de sa troupe au domicile des Sénateurs.

« C’est certain que c’est particulier (de revenir à Montréal), mais j’essayais de ne pas trop y penser parce qu’on voulait se concentrer sur notre saison et la séquence exigeante que nous avions avant ce match. Cette saison, j’avais demandé aux joueurs de ne pas regarder trop loin en avant ou en arrière et je me devais de faire la même chose », a commenté Roy.

« Sauf que je ne peux passer sous silence les belles années avec le Canadien et le rapprochement avec l’organisation depuis le retrait de mon numéro. J’ai beaucoup de respect pour l’organisation et ses partisans qui ont toujours été derrière moi », a-t-il poursuivi.

Celui qui a rendu le numéro 33 célèbre à Montréal a permis à l’Avalanche d’effectuer un saut prodigieux de l’avant-dernière position la saison dernière au sein de l’élite du circuit en 2013-2014.

Cependant, Roy insiste sur le fait qu’il ne prendra jamais le crédit pour les résultats de ses troupiers. Quelques minutes avant son point de presse - aussi couru que celui d’une vedette rock – le discours était complètement différent dans le vestiaire alors que ses joueurs ne cessaient de l’encenser.

« Je ne vais jamais prendre le crédit pour les succès de l’équipe. Ce sont les joueurs qui nous permettent d’être installés à cette position. Les joueurs n’avaient pas participé aux séries depuis 2010 et ils avaient le goût que ça change. Nous avons été impressionnés par le noyau dès la première journée », a-t-il précisé.

À la suite d’un séjour d’une dizaine de saisons derrière le banc des Remparts de Québec dans la LHJMQ, Roy se sentait enfin prêt à assumer le même rôle dans la LNH. Compétitif comme il est, il avait souvent répété qu’il attendait le moment idéal et la préparation adéquate pour accéder à ce niveau.

« Mes 10 saisons au niveau junior ont été très importantes donc j’ai été bien préparé pour cela. Je trouvais aussi essentiel d’être bien entouré et ça rend mon travail beaucoup plus facile. Mes adjoints jouent un rôle déterminant dans les succès de l’équipe. »

Dès son arrivée, la culture a changé au sein de l’organisation du Colorado et les résultats n’ont pas tardé à se transposer sur la patinoire. De l’avis des joueurs, Roy est l’architecte de ce changement colossal pour de nombreuses raisons.

« On a remarqué un gros changement avec Patrick qui a modifié notre philosophie. Les joueurs ont plus la chance de s’exprimer sur la patinoire et on s’amuse beaucoup plus quand on se présente à l’aréna ce qui a mené vers une saison plus intéressante », a vanté Jean-Sébastien Giguère à qui Roy a confié le départ de mardi ce qui plaira aux nombreux membres de sa famille qui seront présents. 

En plus d’avoir redonné un système efficace à cette équipe, Roy s’est particulièrement attardé à changer la dynamique de la formation. Au lieu de se présenter avec ses gros sabots, comme il aurait pu le faire en vertu de sa réputation, il a instauré un climat de collaboration et il s’est établi comme un partenaire auprès de ses joueurs et non un entraîneur autoritaire.

« La clé de notre succès est la qualité des individus dans notre équipe et l’attitude de notre groupe incluant les entraîneurs. Je peux me concentrer sur la relation avec les joueurs puisque la communication est excessivement importante à mes yeux. Dès le premier jour, on voulait instaurer une relation de confiance et respect. On a développé un partenariat avec les joueurs pour les impliquer dans le système », a détaillé l’homme de 48 ans.

Étant donné ses frasques démontrant son immense passion dans le passé, les joueurs n’ont pas hésité à admettre qu’ils ont été étonnés par ce visage de Roy. En fait, la plupart des joueurs s’attendaient à évoluer sous les ordres d’un entraîneur extrêmement exigeant et parfois colérique.

« J’ai été étonné par plusieurs aspects chez lui. Je ne savais pas à quoi m’attendre parce que j’ai été échangé après une douzaine de matchs. On se demandait comment son côté compétiteur de joueur allait se transmettre dans son rôle d’entraîneur. Je m’attendais à beaucoup d’intensité de sa part, mais je suis surtout surpris par son positivisme chaque jour. Ça se reflète sur les joueurs même quand c’était un peu plus difficile cette saison », a confié Maxime Talbot. 

À leur surprise et leur grande satisfaction, l’ancien gardien étoile a plutôt fait preuve d’une complicité de tous les instants avec ses joueurs et il aurait même réussi le tour de force de ne pas s’emporter une seule fois.

« Les gens m’ont toujours vu en surface donc ils ne peuvent pas exactement savoir comment je me comporte. Bien sûr, je suis une personne intense, mais le fait d’avoir passé 10 saisons dans le junior m’a permis d’apprendre à travailler avec les jeunes d’aujourd’hui. Mon approche a sensiblement toujours été la même et on se concentre sur chercher des solutions », a évoqué Roy.

« Le fait de leur parler de façon positive est bénéfique pour nous. Notre groupe veut bien faire et les joueurs ont plus besoin d’un partenaire que d’un entraîneur qui impose ses directives », a-t-il justifié.

Des joueurs emballés par son impact

Vétéran de 15 saisons dans le circuit Bettman, dont sa troisième avec l’uniforme de l’Avalanche, Giguère peut aisément remarquer les différences entre les entraîneurs et il a affirmé qu’il n’avait jamais vécu une telle ambiance par le passé et que c’était rafraîchissant même à 36 ans.

Patrick Roy

« Une grande partie de notre succès revient à Patrick. L’entraîneur joue un rôle très important au hockey et il a été un complice avec nous. Je ne l’ai jamais vu se fâcher, si vous pouvez me croire, et même quand il aurait pu le faire. C’est fort différent de tout ce que j’ai vu dans le passé et tous les joueurs apprécient cela », a fait remarquer le gardien qui a gagné la coupe Stanley avec les Ducks en 2007. 

L’un des mérites de Roy s’avère le développement inspirant qu’il a effectué avec les plus jeunes joueurs de son organisation avec la rapide éclosion de Nathan MacKinnon en avant-plan.

Ce dernier a reconnu avec plaisir que Roy avait été très patient à son égard et il lui a envoyé plusieurs fleurs. Concrètement, il a soutenu que son entraîneur mériterait d’être en nomination pour le trophée Jack Adams qui revient au meilleur de la profession. Ce compliment est également venu de la bouche de Talbot quelques mètres plus loin dans le vestiaire.

Cinq mois après avoir amorcé sa première saison dans la LNH, Roy se retrouvera derrière le banc des visiteurs au Centre Bell alors qu’il a été considéré pour occuper celui de l’autre côté de la surface glacée.

Roy a confié qu’il s’était très bien remis de la décision de Marc Bergevin d’avoir embauché Michel Therrien en ajoutant qu’il trouvait que c’était un choix logique pour ne pas miser sur un duo composé d’un entraîneur et d’un directeur général sans expérience dans la LNH.

« Je comprenais sa réflexion donc le deuil n’a pas été très difficile à faire et ça m’a ouvert les yeux que j’avais vraiment le goût de vivre cette expérience », a révélé celui a les coudées franches à Denver.  

Comme il l’a fait souvent depuis le début du calendrier, Roy a vanté la contribution de ses adjoints dont André Tourigny et Mario Duhamel qui ont fait le saut avec lui en provenance de la LHJMQ.

Roy a bien fait rire quand il a mentionné que le poste de Tourigny était en danger si son ancienne équipe, les Huskies de Rouyn-Noranda, éliminaient ses Remparts de Québec en séries dans la LHJMQ.

« La job d’André est jeu! Si les Huskies gagnent, il ne sera pas de retour avec nous donc tout semble correct pour les Remparts », a blagué Roy qui a plusieurs fois parlé avec Philippe Boucher et Martin Laperrière. 

Pour une multitude de raisons, ce match entre Roy et le Canadien ne sera pas banal. En plus du fait que les éliminatoires approchent à grands pas, il est difficile d’oublier que son numéro 33 brille dans les hauteurs du Centre Bell. Il y est depuis une cérémonie qui avait réconcilié Roy avec l’organisation montréalaise.

« Le crédit revient à mes joueurs »
« J'ai un groupe extraordinaire de joueurs »