OSTRAVA, République tchèque – Trevor Zegras est arrivé à Ostrava précédé d’une solide réputation. Si vous avez été sélectionné dans le top-10 du repêchage de la Ligue nationale l’année précédente, le Mondial junior n’est pas le genre d’événement où vous passerez inaperçu.

 

Mais même dans ce cocon rempli d’observateurs aguerris, le numéro 9 de l’équipe américaine est en train de marquer les esprits. Alors que les États-Unis viennent de conclure leur calendrier de la ronde préliminaire, Zegras domine le classement des compteurs de la compétition avec neuf points.

 

Tous ces points sont des mentions d’aide. Et presque toutes ces mentions d’aide sont une ode au jeu dans sa plus pure beauté. Tenez, quelques exemples.

 

26 décembre | États-Unis 2 – Canada 0 | Les Américains tentent de profiter d’un jeu de puissance en fin de première période quand Alex Turcotte se faufile de peine et de misère derrière deux défenseurs canadiens. Sa passe en retrait est légèrement imprécise, mais Zegras étire les bras derrière lui pour la capter et ramène la rondelle sur son côté fort en la passant entre ses jambes. Immédiatement, il l’a refile à Arthur Kaliyev à travers l’enclave. C’est son premier point du tournoi.

 

27 décembre | États-Unis 4 – Allemagne 3 | À la surprise générale, les Allemands atteignent la mi-match en avance par un but. Zegras corrige d’abord la situation en préparant le but égalisateur de Shane Pinto. Quatre minutes plus tard, il se dirige derrière le filet adverse en protégeant le disque sur son revers, puis pivote subitement vers sa droite pour rejoindre Curtis Hall devant le filet, sans regarder, alors que son momentum l’en éloignait.

 

30 décembre | États-Unis 3 – République tchèque 2 | Les Tchèques ratent une occasion de sortir la rondelle de leur territoire. Kaliyev la récupère à la ligne bleue et la remet dans le coin de la patinoire à Zegras. Celui-ci pivote à la réception de la passe, évalue ses options et voit Jack Drury qui fond vers le filet sans éveiller les soupçons des deux défenseurs. Zegras fait la toupie et fouette une passe vers son coéquipier, qui bat le gardien de vitesse.

 

« C’était digne de Patrick Kane, a comparé Drury après la rencontre. Je fonçais au filet en me disait que je pourrais peut-être obtenir un retour ou sauter une rondelle égarée. Puis je baisse la tête et la rondelle est sur ma palette. C’était fou, assurément la plus belle passe qu’on m’ait faite de toute ma vie. »

Kaliyev complète un belle manoeuvre et double l'avance

 

« Je crois que c’est l’une des plus cool que j’ai réussies, juste à cause du contexte dans lequel c’est arrivé », réfléchissait Zegras, qui comparait humblement sa manœuvre à celle qu’Auston Matthews avait exécutée une semaine plus tôt contre les Hurricanes de la Caroline.

 

Kaliyev connaît Zegras depuis l’âge de 10 ans. Les deux ont fait leurs classes au sein de l’Association de hockey mineur de Mid Fairfield, au Connecticut, un programme dans lequel a aussi grandi le gardien Spencer Knight. Il ne pouvait pas se rappeler d’une passe plus spectaculaire que celle que Zegras venait de servir à Drury après la victoire contre les Tchèques.

 

À l’adolescence, Zegras a poursuivi son chemin au sein du programme de développement américain tandis que son ami d’enfance a dévié vers le circuit junior canadien. Kaliyev estime que les deux n’avaient pas joué ensemble depuis au moins trois ans quand l’entraîneur américain Scott Sandelin les a réunis sur un même trio au début du tournoi.

 

Kaliyev, un dangereux franc-tireur qui revendique 113 buts en 168 matchs dans la Ligue de l’Ontario, en a marqué quatre à Ostrava. Chacun d’entre eux a été préparé par Zegras.

 

« Je le connais depuis longtemps et je crois qu’il y a une belle connexion entre nous. Il est un passeur, je suis un tireur et le courant passe bien entre nous. »

 

« Il est tellement dynamique, il faut toujours être sur ses gardes avec lui parce qu’il risque à tout moment de faire quelque chose d’inattendu, affirme Cole Caufield. Il est brillant et bourré de talent. Il trouve toujours un moyen pour placer la rondelle où l’adversaire ne l’attend pas. C’est un art qu’il maîtrise probablement mieux que la plupart des gens. »

 

« Même moi, je pourrais probablement marquer une couple de buts dans ce tournoi si je recevais des passes comme celle-là », blague Sandelin.

 

Les talents de passeur de l'espoir des Ducks d'Anaheim sont homologués depuis longtemps. À sa seule participation au championnat du monde des moins de 18 ans, il a compilé neuf passes décisives en cinq matchs. Cette même année, il a amassé 61 aides en 60 matchs avec le programme de développement américain.

 

Mais la liste de ses accomplissements pourrait bientôt passer à un autre niveau. Avec une aide en quart de finale, Zegras deviendrait le huitième joueur à en amasser au moins dix dans une même édition du Mondial junior depuis 2000. Il pourrait même éventuellement menacer le record de la formation américaine, que Doug Weight a établi en 1991 avec 14.

 

« Je ne sais même plus ce que ça fait de marquer un but, constate, mi-blagueur, le jeune fabricant de jeu. Il n’y a rien qui bat une passe décisive pour moi. Je ne sais pas pourquoi, mais il y a quelque chose là-dedans que j’aime vraiment. »